samedi 17 août 2013

C'est le début de la fin.





            Si vous m’aviez dit il y a cinq ans, pratiquement jour pour jour (c’était le 11 août 2008 aux alentours de 14h heure locale), lorsque j’ai foulé pour la première fois le sol londonien, qu’environ 1826 jours plus tard (enfin, on n’est pas à une vache près, hein, on se comprend) j’allais retourner dans cette même ville pour y vivre… eh bien pour être honnête, je ne vous aurais pas ri au nez. Non. Passons les grands discours émouvants, les « je me suis sentie à ma place tout de suite » blablabla, bien trop communs pour expliquer ce que je crois naïvement être la seule à avoir vécu. Mais c’est vrai. J’avais cette impression bizarre de « comprendre » le monde autour de moi. Et un profond émerveillement vis à vis des choses les plus simples : les boîtes de conserve qui n’ont pas les mêmes noms, les plaques d’immatriculation des voitures, les pavés des trottoirs. À ce point là de l’histoire, toute forme de moquerie est tout à fait envisageable et même fortement conseillée.
            Quoi qu’il en soit me voilà aujourd’hui à une semaine de mon départ pour la capitale britannique (comme on dit au JT),  « là où tout a commencé » (comme on dit dans les histoires de Barbara Cartland et de Pierre Bellemare, chacun de leur côté, ça va sans dire) et ce n’est somme toute pas si surprenant, car comme dirait mon dernier exposé d’Italien: la vie est un cercle, comme la roue d’une bicyclette. Évidemment, sortie de son contexte, cette remarque perd un peu de sa puissance mais permettez moi de la dédier à ma prof de philo de terminale qui, je n’en doute pas, ne manquerait pas de la trouver ô combien enrichissante et complexe.

            J’aimerais aborder avec vous des sujets aussi variés et intéressants que la dyslexie de Noel Gallagher, les preuves de la mort de Paul McCartney dans les pochettes des albums des Beatles, l’interdiction formelle de se maquiller avec du crayon bleu et le mec qui a inventé les Kinder Buenos et les abat-jours. Dans l’ordre. Mais là n’est pas le propos, même si j’en meurs d’envie, parce que j’ai trouvé encore bien meilleur sujet de conversation, à savoir, moi-même. Enfin, « de conversation », là encore, on se comprend; c’est moi qui tient le blog et qui écrit et vous avez tout juste le droit de mettre des commentaires, que je lirai et déciderai ou non de publier, alors autant vous le dire tout de suite, on est bien loin de la démocratie.
            Non, ici, c'est l’Empire State of Charlotte.


            Alors disons que l’histoire commence ici.

            À vrai dire, j’ai toujours aimé les commencements, c’est d’ailleurs mon passage préféré dans les romans. Enfin, (notez le nombre de « enfin » dans cet article sur papier libre et renvoyez-le à l’adresse postale suivante- non j’rigole), c’est ce que je préfère... quand j’ai lu la dernière page, juste pour voir si le bouquin vaut la peine d’être lu. Inutile de vous cacher, vous le faites aussi.

            Parce que j’ai toujours aimé la perspective, le fait que le paysage nous dépasse et que l’horizon s’étende au-delà de ce que notre œil voit. Il y a cette curiosité, cette excitation que l’on voudrait éternelle, de découvrir des aventures et des sensations nouvelles. Oui, de découvrir, c’est ça le mot juste. Parce que dans les commencements, on ne comprend jamais vraiment tout, car un commencement ne prend tout son sens que lorsqu’on le regarde par-dessus son épaule quand on a déjà parcouru un bout de chemin.
            Beaucoup de romans commencent « in medias res » (j’ai fait Latin LV14) c’est à dire que l’on est plongé directement au cœur de l’intrigue, comme projeté à l’intérieur de celle-ci sans ménagement. D’où ce sentiment un peu troublant et très déstabilisant d’atterrir dans un environnement hostile où tout nous est étranger. Mais peut-être pas tant que ça. Comme la première fois que l’on arrive dans un endroit qui nous est inconnu : qui nous fascine et pourtant nous impressionne. Un lieu qu’il va nous falloir dompter, à la force de nos yeux, de notre esprit, de notre imagination. Et petit à petit on se fera une place, on se fera notre propre place. Tous ces murs qui nous semblaient tagués des noms de tellement d’autres personnes, finiront par nous apparaître telle une feuille jamais tout à fait blanche mais que l’on se permettra quand même de colorier à l’envi. Ce ne sera peut-être pas un chef d’œuvre, mais une œuvre pour sûr, que l’on sera fier de signer.

            Parce qu’un début n’existe pas vraiment en soi, parce qu’on ne sait jamais vraiment quand c’est le commencement. On ne le réalise que plus tard, et alors, on le juge, on le critique, on l’apprécie à la lumière de ce qui a été vécu.
            Et alors seulement on lui donne une certaine importance dans un ensemble plus ou moins harmonieux.
            Et alors seulement on décide que c’était le début.
            Alors disons que l’histoire commence ici. Pas là-bas, pas ailleurs, ICI. MAINTENANT. Parce qu’il faut bien un point de départ, alors pourquoi pas celui-là.
            Alors disons que l‘histoire commence ici. Enfin, la mienne en tout cas.
            Alors disons que mon histoire commence ici. Et quelle histoire, j’en suis sûre.


            Cette fois, c’est la première page de mon propre roman que j’écris, j’espère que cette entrée en matière ne vous aura pas paru trop brutale et que comme moi, vous avez hâte d’atteindre le point de fuite de cette infinie perspective qui se dessine. Pour enfin lire la dernière page et savoir si le bouquin valait effectivement la peine d’être lu.

            Je fais partie de ces gens qui d’habitude veulent savoir où le chemin les mènera. Mais pour une fois, je voudrais me dire que la destination importe peu et apprécier le paysage sur le chemin.

            Après tout, qui pourra vraiment dire quand c’est la fin ?


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            Car oui, le coq est bel et bien un oiseau migrateur, qu’importe la catégorie d’animal dans laquelle on veut tenter de le classer. Et se moquant des cases dans lesquelles il ne rentrera jamais et des critères auxquels il ne répondra pas plus, il vous salue d’un coup de crête écarlate avant de plier son baluchon et s’envoler d’un battement d’ailes multicolores.

(Comme j'ai beaucoup d'humour, je vous mets la photo d'une poule pour clôturer cet article).



In a bit,


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